– À cette même période l’année dernière tu allais vraiment très mal…
– Pourquoi ? Qu’est-ce que j’avais ?
– Tu étais enceinte !
– Aaaaaaah c’est vrai ! Oh gosh j’avais oublié !
Je ne suis pas de ceux qui croient au bonheur.
Si vous me lisez depuis longtemps alors vous savez que la dépression est une de mes compagnes de longue date. J’ai eu du mal à l’accepter, mais aujourd’hui je comprends que c’est un état d’esprit, et qu’il doit être compris et accepté comme tel.
Je ne crois pas au bonheur en ce sens que je ne pense pas qu’on puisse être heureux sur la durée sans aucune raison. Je connais le bonheur à des moments précis grâce à des événements précis. Le sourire de mon enfant. Ma mère qui me fait à manger. Ma sœur qui me fait rire. Le papa du petit humain qui challenge ma réflexion.
Bien que ce soient des souvenirs que je chéris, ils ne sont pas avec moi tout le temps. Ce sont des événements que je vis à des moments précis. Alors il m’est difficile d’être assise dans mon salon toute seule et d’être heureuse si aucun fait précis ne déclenche ce bonheur.
Généralement je ne ressens rien. Absolument rien. Et de ce rien peut parfois naître une grande tristesse. Je pense que la tristesse est le sentiment de base, et qu’il est temporairement éloigné par ce rien ou par ces événements qui procurent du bonheur.
Depuis hier je me sens sombrer dans un épisode dépressif. Je n’en ai pas connu depuis la naissance du petit humain. Hier une amie m’a proposé d’enregistrer un épisode de podcast sur la dépression. Je le ferai. Il est possible que ce soit le fait de penser à la structure de cette épisode qui me plonge dans une tristesse et un questionnement inexplicables.
Il est également possible que ce soient ces grands chantiers que j’entreprends la peur au ventre et les changements qui sont supposés aller avec qui me tirent vers le bas. On est toujours mieux dans la stagnation qui nous est familière. Changer, évoluer fait peur. Cette résistance entraîne parfois chez moi de terribles épisodes dépressifs.
J’ai cessé de chercher à me forcer à aller mieux. Aujourd’hui je me laisse sombrer et je me regarde tomber. Je fais tout ce que je sais ne pas être bon pour moi… juste parce que j’en ai envie, mais aussi parce que c’est de cette manière qu’une dépression se vit. Elle bousille tout. Inutile de chercher à ramasser les bouts de verre derrière soi. Ce serait se focaliser sur l’inutile : ce qui est déjà brisé.
Je vais mal, et je me suis demandée pourquoi. La vérité est que je ne sais pas. Je spécule. Je me fais des films. Je me convaincs aujourd’hui que cette raison-ci ne peut être que la bonne, et demain je m’accroche à une autre. Peut-être que je vais mal pour de nombreuses raisons. C’est possible aussi. Mais à ce moment de ma journée je n’en ai absolument rien à foutre.
Je vais me laver les cheveux dans l’attente de la catastrophe prochaine. Une nouvelle crise de larmes ? Rester dans le lit dans une seule position pendant des heures à fixer le plafond ou le mur ? Me demander si ma vie a réellement de la valeur à mes propres yeux ?
Je vais me laver les cheveux car il faut bien meubler le temps avant la prochaine crise.
Je vous l’ai dit, le prochain épisode du podcast Les Papotages de C. portera sur la dépression. Si vous avez des questions auxquelles vous souhaitez que je réponde alors posez-les moi en commentaire.
Photo : Muhammadtaha Ibrahim
PS : peu de gens le savent, mais il est possible de surligner des passages des articles, comme c’est le cas sur Medium. Ce serait bien d’utiliser cette fonctionnalité pour que je sache quelles sont les parties du texte qui ont retenu votre attention. Et puis, il faut bien que mon argent serve à quelque chose puisque j’ai payé pour cette fonctionnalité !
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« Les limites de mon langage sont les limites de mon univers. »
Ludwig Wittgenstein
Mon amie Nadia m’a dit une fois que faire la lecture à un enfant, même âgé d’1 mois, est très important. Elle a appuyé cet avis en disant que la lecture permet à l’enfant d’avoir un vocabulaire riche. À travers les histoires qui lui sont lues, il entend des mots qu’il n’aurait autrement jamais entendus.
Je n’ai pas repensé à cette explication jusqu’à tout récemment. Je fais la lecture au petit humain, tant en français qu’en anglais afin qu’il prenne l’habitude de lire, mais aussi pour qu’il découvre d’autres mondes, d’autres univers.
Je suis encore plus attachée à cette idée qu’au départ parce que je me suis rendue compte des limites de mon vocabulaire lorsque je parle. Je parle généralement aux mêmes personnes et j’utilise les mêmes mots conversation après conversation, jour après jour. Lorsque je parle au petit humain je pense utiliser un maximum de 200 mots.
J’utilise un maximum de 200 mots parce que je lui répète les mêmes choses au fil des jours. Et parfois on passe du temps tout les 2 sans nous parler (j’avoue assurer 90% de la conversation, ce qui ne la rend pas moins intéressante !). Cette réalisation a été pour moi effrayante. Je parle à mon enfant, mais si nous nous limitons à ce que je dis moi, il n’ira pas bien loin. Il apprendra certes des mots nouveaux, mais ils n’ont de nouveaux que le fait qu’il n’en connaisse aucun. Il est une toile vierge sur laquelle je repeins le même tableau au fil des jours.
Nous avons tous les 2 besoin de nous appuyer sur des mondes qui ne sont pas les nôtres, sur des histoires qui décrivent d’autres réalités pour étendre notre champ. Je suis riche de centaines d’autres mots, mais le petit humain n’en bénéficie pas parce que la configuration dans laquelle nous sommes, notre quotidien ne me pousse pas à les utiliser. Le fait que j’évolue dans les mêmes cercles et qu’ils soient peu nombreux favorise la perte de valeur, et même l’oubli de ces mots que je n’utilise jamais.
Ces derniers temps je fais face à un réel blocage.
Je n’arrive pas à aller au-delà d’un certain seuil dans ma réflexion. J’ai rencontré ce problème il y a 3 ans, et ça a résulté en l’abandon d’Elle Citoyenne. C’est l’une des nombreuses raisons en tout cas. On n’en parlera pas ici, je prépare à la demande de Tchonte (c’était plus un ordre qu’autre chose…) un épisode de podcast sur toutes les failles qui ont fait couler cette initiative.
La question que je me pose peut être résumée en 3 mots : What’s next ?
Je vous explique.
Mes écrits tout comme mes réflexions sont publics depuis 2015. J’écris pour réfléchir, ce qui permet aux lecteurs d’enrichir eux aussi leur réflexion à travers les questions que je me pose ou les sujets que j’aborde. Depuis quelque temps, je le fais également à travers le podcast Les Papotages de C.
J’écris et à présent je parle. Ca peut sembler être un grand bond, mais ça ne l’est pas si on regarde la chose sous l’angle du partage. J’expérimente, je réfléchis, je synthétise et je partage. Je ne prétends pas que bloguer et « podcaster » requièrent les mêmes ressources. Loin de là. J’acquiers de nouvelles connaissances grâce à l’enregistrement du podcast, mais sur la base le principe reste le même : j’expérimente, je réfléchis, je synthétise et je partage.
J’ai l’impression de ne pas avancer, et je ne sais où aller, quel chemin emprunter pour avancer.
What’s next ?
Le blogging en Afrique francophone semble ne pas mener à grand-chose de concret. J’en ai certes bénéficié et j’ai obtenu mon boulot actuel grâce à mon travail dans le domaine de la participation citoyenne, mais nous sommes peu nombreux. Et le type de blogging sur lequel je me focalise à présent (que j’ai appelé authentic blogging lorsque j’ai commencé à écrire sur Medium) ne porte pas sur les sujets habituels, connus : mode, beauté, lifestyle, cuisine, tech…
L’affranchissement de l’humain est au centre de ma réflexion et de mes partages. Ma vie, le contenu que je consomme et les leçons apprises sont la base de nos échanges. Et ces échanges se matérialisent par du contenu long format qu’il s’agisse d’articles ou d’épisodes de podcast.
Lorsque j’ai commencé à me demander What’s next, je me suis mise à la recherche de personnes en Afrique francophone et en Afrique dans un sens plus large qui jouent sur le même terrain que moi. Je n’en ai trouvé aucune.
Alors je me suis tournée vers des personnes connues dans le monde de l’écriture et de l’édition en Afrique francophone. Aucun d’eux n’a pu répondre de manière satisfaisante à ma question. What’s next ?
J’ai écumé internet et ce qui y était proposé était hautement déprimant. Un blogueur qui évolue et « réussit » est celui qui a des partenariats et qui inonde ses abonnés, qui l’ont suivi au départ pour son authenticité, de codes promo pour l’achat de produits au-dessus de leurs moyens, peu utiles pour eux, ou dont les revues du blogueur sont discutables. Ce qui me rappelle de partager avec vous cet article d’Abisola Shof que m’a envoyé mon amie Françoise et qui m’a bien fait rigoler : Dear Influencers, We Are Tayad !
Ceci est à l’opposé de ce que je souhaite. Je ne suis pas un panneau publicitaire. Je ne dis pas que je ne présenterai jamais de produits. Je dis que je ne présenterai rien que je n’utilise pas personnellement, qui n’est pas dans mes moyens et/ou qui ne m’est pas utile sur une base régulière.
Donc voilà. J’étais stuck. Et j’en ai parlé au papa du petit humain.
Il m’a dit ceci (je paraphrase) : tu ne trouveras aucune réponse satisfaisante à ta question parce que tu te focalises sur un seul environnement (l’Afrique en général et l’Afrique francophone en particulier), tu ne questionnes que des gens que tu connais qui, selon toi, ont percé dans le domaine qui t’intéresse.
Je me suis énervée.
En général je m’énerve quand mon subconscient sait d’entrée de jeu que la personne en face a raison et que je fais n’importe quoi. Je m’énerve, puis je me calme et je vais vers la personne pour lui dire qu’en réalité elle a raison. C’est seulement après ces étapes que je suis prête à recevoir « la connaissance ».
Le papa du petit humain avait entièrement raison.
Cette situation est comparable à celle de mes discussions pauvres en vocabulaire avec le petit humain. Si nous nous limitons tous les 2 à mon univers, il n’acquerra rien de neuf une fois les mots appris de moi retenus.
Je suis au niveau où je suis aujourd’hui dans le domaine de l’écriture et du blogging grâce à mon expérience, mais également grâce aux personnes actives dans ce domaine qui m’entourent. Je me tourne toujours vers les mêmes gens lorsque je rencontre des difficultés. Au départ leurs réponses étaient édifiantes, mais aujourd’hui nous sommes tous quasiment au même niveau de connaissances, alors je connais déjà les réponses qu’elles me donnent, sauf qu’elles ne m’intéressent pas. Raison pour laquelle je pose exactement les mêmes questions.
Et je me focalise sur l’Afrique francophone parce que c’est le milieu dans lequel j’évolue. J’ai fait le choix conscient d’écrire en français, parce que le style de blogging que je pratique est relativement inexistant dans cet espace. Alors je m’attelle à résoudre les problèmes rencontrés dans cet espace.
Sauf que…
Je semble avoir épuisé toutes les ressources tant auprès de ces gens que je sollicite que dans l’environnement dans lequel j’évolue. La chose est plus délicate en ce qui concerne l’environnement est que ce que je fais moi semble ne pas être courant, alors les réponses existantes ne sont pas utiles dans le cadre de mes besoins.
Selon le papa du petit humain je dois commencer par sortir de mes cercles habituels. Je dois questionner des gens qui ont réussi dans leur domaine mais que je n’aurais jamais envisagé aborder soit parce que leur activité est très différente de la mienne, soit parce qu’ils évoluent dans un environnement très différent du mien. Je dois cesser de recommencer à zéro sur un terrain que j’ai labouré de long en large des dizaines de fois.
Ces gens ne font pas face aux mêmes problèmes que moi et leur environnement est différent du mien, mais toute solution est customisable. Un problème rencontré par eux peut se rapprocher d’un des problèmes auxquels je fais face, même si ça semble ne pas être le cas à première vue, et la solution déployée peut m’être utile.
J’étais bloquée parce que je répétais encore et encore le même processus de recherche, convaincue que la réponse était forcément là, quelque part. Comme l’a dit l’illustre Puff Daddy, « Keep doing what you’re doing, you will keep getting what you are getting. » En gros ? I was getting nothing !
La gifle a fait mal.
Tout a changé lorsque j’ai suivi ce conseil.
Les premières idées concrètes me sont venues après lecture de quelques pages d’un livre sur le business et l’entrepreneuriat. Il ne me serait jamais venu à l’idée de lier mon écriture à des concepts de business. Je pensais fermement que les 2 domaines étaient tellement à l’opposé l’un de l’autre qu’il fallait que j’évite de perdre mon temps.
Les secondes idées me sont venues alors que j’ai écouté Josh Silverman sur le podcast Masters Of Scale, podcast que j’avais mis de côté depuis un moment étant donné qu’il ne répondait pas à mes besoins actuels. Josh Silverman parlait de l’expansion d’Ebay et Skype. En temps normal je ne me serais pas attardée sur cet épisode parce qu’Ebay et Skype…
Je ne peux pas dire aujourd’hui que ma feuille de route est claire. Je peux par contre affirmer qu’elle s’enrichit au fil des jours, et grâce à des apports de sources à mille lieues des cercles dans lesquels j’évolue ou qui me sont familiers.
Nous faisons très vite de notre bulle la seule réalité valable à nos yeux, raisons pour laquelle nous passons à côté de beaucoup, mais alors beaucoup d’opportunités d’apprentissage et d’expérience. Je suis heureuse d’avoir près de moi une personne qui me le rappelle au quotidien… même si je m’énerve !
Je sors de plus en plus le petit humain de la maison. Il ne peut et ne doit rester enfermé au quotidien entouré des mêmes personnes. Leurs champs limités deviendront les siens, et il se convaincra comme je l’ai fait que rien de bon ou d’utile n’existe au-delà. Il se tournera vers les mêmes gens pour trouver réponse à ses questions et n’ira pas au-delà de leurs acquis et croyances.
Si vous nous voyez arpenter les rues de la ville, lui dans son écharpe de portage et moi mon sac à dos bien accroché, n’hésitez pas à nous faire un coucou !